Les grands enjeux de la rentrée politique
Ce qui se joue actuellement dans le rapport de force gauche/droite, ou plus précisément dans le rapport exécutif/législatif, mérite toute l’attention des Français qui trancheront par leurs votes à venir et leur mobilisation auprès des parlementaires.
La réforme territoriale engagée par N. Sarkozy sur la base des propositions de MM Balladur et Blanc effacerait, par quelques articles de loi, tout le travail mené par la gauche depuis 1984 sur la décentralisation. Elle aboutirait à une reprise en main directe des territoires par l’Etat et, disons-le clairement, par l’UMP. Cette réforme s’articule autour de quatre grands axes :
- Le redécoupage des circonscriptions
- La suppression des Conseillers généraux et des Conseillers régionaux
- Les 7 plus grandes villes passeraient sous un statut de métropoles
- Un statut spécial pour l'ile de France
- Le redécoupage des circonscriptions qui permettrait à la droite de garder la majorité à l’Assemblée Nationale, même si elle ne recueillait que 48% des suffrages dans le pays ;
- La suppression des Conseillers généraux et des Conseillers régionaux (aujourd’hui majoritairement de gauche) remplacés par des « Conseillers territoriaux » qui siègeraient dans des instances départementales et régionales fusionnées de fait. Elus à la majorité dans les zones rurales (là où la droite est majoritaire), ils seront élus, comme par hasard, à la proportionnelle dans les zones urbaines (là où la gauche est majoritaire). Outre la possibilité pour la droite de reprendre la majorité dans la plupart des départements et des régions, cette réforme éviterait à l’UMP de perdre la majorité au Sénat, ce que redoute par-dessus tout le président de la République.
- Les sept plus grandes villes passeraient sous un statut de « métropoles », établissements publics d’intérêt général qui fusionneraient les communes, supprimeraient les intercommunalités et reprendraient, en plus, les compétences du département. Le mode de désignation des administrateurs de ces métropoles n’est pas défini, mais ne se ferait pas au suffrage universel.
- Un statut spécial pour l’Ile de France, sur laquelle le président de la République veut reprendre la main, quel que soit le résultat des élections régionales. Il serait créé une « Société du Grand Paris », dans laquelle l’Etat serait majoritaire et qui aurait une compétence structurante sur les territoires de la Défense, de Saclay, des zones aéroportuaires et de tous les axes les reliant ou permettant d’y accéder. Cette compétence engloberait les transports (la Région en serait dessaisie), ainsi que le foncier, la voirie, le développement industriel et commercial. Bref, la Région serait priée de ne plus s’occuper que des terres agricoles de Seine et Marne et des Yvelines ! Quant aux communes, elles perdraient tout droit de préemption dans une bande de 1500 m autour des axes de transport concernés.
La suppression de la Taxe Professionnelle : Il s’agit là, purement et simplement, de diminuer de 80% la fiscalité locale acquittée par les entreprises. Même le Medef n’en demandait pas tant ! Du coup, la part de la fiscalité locale supportée par les ménages augmenterait de 39% et représenterait les trois quarts des impôts versés, hors dotations, aux communes et communautés. Certes, l’Etat promet de compenser la perte de ressources des communes et des communautés … la première année. Mais avec quelles recettes ? Et que se passera-t-il les années suivantes lorsque la compensation de l’Etat n’augmentera que du tiers de l’inflation, comme on le constate depuis plusieurs années ?
Tous ces bouleversements ne visent pas seulement à priver la gauche des majorités qu’elle a su rassembler sur de nombreux territoires. Ils visent aussi et surtout à assurer la mainmise de l’Etat sur l’ensemble des collectivités locales, au détriment, s’il le faut, des règles les plus élémentaires de la démocratie élective. Qui plus est, les collectivités territoriales ont des capacités d’emprunt que l’Etat a totalement perdues depuis 2 ans. Faire financer par les collectivités locales les projets de l’Etat impécunieux serait la brillante martingale du moment ! Au-delà de la mobilisation de la gauche, certains parlementaires de droite l’ont bien compris qui s’inquiètent, pour l’instant discrètement, de ce bonapartisme ravageur.