Une crise européenne
Que je puisse, par mes deux nationalités, grecque et allemande (j’ai en plus acquis la nationalité française, suite à mon installation en France), incarner un jour la fracture qui passe par l’Europe ne me serait jamais venu à l’esprit il y a encore quelques années.
La crise grecque, qui avait débuté en 2009 au moment où les marchés financiers ont commencé à appliquer des taux d’intérêts différenciés selon les Etats de la zone Euro, impose un rythme infernal à l’Europe depuis. L’Europe a clarifié certains principes, certes :
des mécanismes de « solidarité » (solidarité toute relative car il s’agit de prêts) ou le début d’une union bancaire par exemple. Mais à quel prix ! L’appauvrissement de certaines populations, en Grèce mais aussi en Espagne ou en Italie, découle directement d’une absence de véritable solidarité entre les nations européennes. Il y avait d’autres voies possibles, par exemple le recours à des euro-obligations (eurobonds). Cette solution a été très rapidement abandonnée en raison d’un refus catégorique de l’Allemagne et de quelques autres pays.
Depuis cet été, la crise des réfugiés a rajouté une couche dans les divergences entre les Etats : ceux qui sont frontaliers (à nouveau la Grèce en toute première ligne) ne savent plus comment traiter les arrivants avec la dignité nécessaire. L’Allemagne fait preuve, cette fois-ci, d’un peu plus de bienveillance en annonçant être capable d’accueillir la plus grande partie des Syriens, avant de faire marche arrière pour des raisons de logistique et probablement aussi de résistances venant de la population.
C’était aussi cela l’Europe, telle que nous l’avions imaginée : qu’un pays essentiellement agricole comme la Grèce puisse s’élever et traiter d’égal à égal avec l’Allemagne industrielle et puissante.
Que l’Europe, pôle prospère dans le monde, puisse accueillir une immigration qui comblerait ses propres insuffisances démographiques. Ce n’est pas gagné !
Ceux qui se reconnaissent dans ces valeurs doivent s’exprimer et se faire entendre, car les adversaires de l’Europe gagnent du terrain tous les jours.
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Elisabeth Humbert-Dorfmüller,membre du Parti Socialiste (membre du Secrétariat International), Secrétaire fédérale adjointe (SFA) à l'International dans les Hauts-de-Seine et membre du SPD (secrétaire de section du SPD-Paris).